Culture et patrimoine
Fabrice HYBER
Publié le
Dans le cocon de Fabrice Hyber
Très coté sur le marché de l’art contemporain mondial, c’est à Pantin que le plasticien Fabrice Hyber trouve l’inspiration. Il a accepté de nous ouvrir les portes de son jardin secret.
Portrait de Guillaume Gesret, publié dans Canal n°282, octobre 2019.
Dresser le portrait de Fabrice Hyber est un exercice redoutable, tant son œuvre est foisonnante. Le plasticien le sait d’ailleurs parfaitement. Quand il a réalisé son autoportrait au début des années 1990, il a fabriqué un savon de Marseille, « car il vous échappe, vous glisse constamment entre les mains ». Il faut préciser que ce savon n’était pas n’importe quel savon : il pesait 22 tonnes et a été officialisé comme le plus gros savon de Marseille du monde par le Guinness Book des records.
C’est que Fabrice Hyber a le goût de la démesure. Dans le parc de La Villette, c’est lui qui a imaginé ce parvis de 16 000 carreaux de céramique sur lequel sont représentés 10 000 dessins très caractéristiques de l’univers « hyberien ». Cette œuvre, située à côté des manèges et baptisée L’Artère, commémore les années de lutte contre le sida. « Ce lieu de mémoire est un antimonument, et je suis très amusé de voir que les gens se sont appropriés cet espace pour danser ou qu’il était devenu, il y a deux ou trois ans, un des plus grands spots pour les joueurs de Pokemon Go. »
De nombreux projets en cours
Visiter son atelier, situé dans le Haut-Pantin, est, sans doute, la façon la plus simple pour comprendre l’artiste. Sympathique et guilleret, Fabrice Hyber nous montre ses nombreux projets en cours, des dessins inachevés, des sculptures en attente, des toiles en gestation. « J’ai besoin d’entreprendre plusieurs choses en même temps. Cet atelier spacieux me permet d’étaler mes productions. » S’il a choisi, il y a trois ans, de s’installer dans cet ancien atelier de serrurerie avec son équipe de six collaborateurs, c’est pour « son calme et ses beaux volumes. »
Dans le local, on retrouve plusieurs œuvres qui ont façonné sa réputation, à l’image de cet exemplaire d’un Homme de Bessines, ce petit bonhomme-fontaine vert crachant de l’eau par tous les orifices. « J’ai imaginé cette sculpture à l’âge de 29 ans en me demandant à quoi je pourrais ressembler à 60 ans. Et dire que je vais les fêter dans deux ans… » Nous apercevons aussi le ballon de football carré, l’un de ses célèbres POFs. « J’ai fabriqué 200 objets que j’ai appelés Prototypes d’objets en fonctionnement. Ces POFs sont des objets familiers détournés de leurs fonctions originelles. Je les ai exposés au Musée d’art moderne de la Ville de Paris, au Centre Pompidou, au Mac Val… » Un peu plus loin, l’artiste nous invite à sentir un gros cube rouge. « C’est du rouge à lèvres pur couture n° 1 offert par la maison Yves Saint-Laurent. » Une matière qu’il affectionne et qu’il a utilisée pour recouvrir une toile lorsqu’il était aux Beaux-Arts de Nantes, puis pour réaliser Un mètre cube de beauté, pour une exposition au Palais de Tokyo.
Hyber productif
Pour mesurer la cote de l’artiste, il suffit de l’interroger sur son actualité. Ce membre de l’Académie des Beaux-Arts, ancien Lion d’or de la Biennale d’art contemporain de Venise, est exposé en ce moment à la Fondation Cartier, à la Fondation EDF (Paris) et à la Fondation Carmignac de Porquerolles. Il présente aussi ce mois-ci des dessins au Palais idéal du Facteur Cheval. Pour découvrir ses dernières œuvres, les curieux peuvent aussi se glisser dans l’ambiance feutrée de l’hôtel Lutetia pour admirer la flamboyante verrière qu’il a créée ou pénétrer dans la salle du bistrot Supu Ramen de Guy Savoy, décorée par cet homme « hyber productif ».
À l’occasion de la Nuit Blanche, Fabrice Hyber ouvre son atelier samedi 5 octobre de 20.00 à minuit au 7, rue Gambetta.
Parcours de la Nuit blanche à Pantin.